Caroline Sers, La Maison Tudaure
Quatrième
de couverture : « Quels
secrets recèle la maison Tudaure, une demeure isolée, abandonnée depuis
plusieurs décennies ? Claude, un adolescent un peu bizarre, aime venir
contempler cette bâtisse qui ne ressemble pas à celles du village avec son toit
biscornu et ses volets percés. Jusqu’au jour où il remarque quelque chose
d’inhabituel. Il préfère taire sa découverte. Quand, peu après, les gendarmes
convoquent les villageois pour les interroger, il n’en faut pas plus pour
mettre le feu aux poudres. Car, chez ces gens-là, on se méfie des autorités et
des curieux. Mais il semble pourtant que la forêt dissimule bien des faits
sordides… Caroline Sers, auteur de Tombent les avions (prix du Premier Roman
2004), dose habilement le suspense… »
Comme on dit dans le jargon
littéraire, l’histoire commence in medias
res. Nous ne sommes pas invités à
découvrir les personnages, nous les rencontrons directement au café de Jean
comme si nous les connaissions déjà. C’est alors que l’adjudant Marty débarque
pour interroger les clients (dont nous faisons un peu partie nous aussi !).
Ces gens ne semblent pas aimer le police et encore moi l’adjudant Marty. Ils n’entendent
pas le laisser faire la loi dans leur village.
Il m’est quelque peu
difficile de faire un résumé sans dévoiler quoi que ce soit je vais donc m’abstenir
et donner simplement mes impressions d’une façon assez décousue, comme l’histoire
d’ailleurs !!
En effet, Caroline Sers ne
suit pas une trame chronologique et linéaire des évènements mais fait des bonds
dans le passé sans qu’on s’en aperçoive immédiatement. Personnage du passé,
enfants, et personnages du présent adultes ayant eu des enfants se côtoient d’une
page à l’autre. Ce n’est pas par pur plaisir d’embrouiller le lecteur, non, c’est
une découverte macabre dans les bois qui n’est pas sans rappelé un évènement
survenu des années auparavant quand les adultes de l’histoire avaient une
dizaine d’années tout au plus. Tout ce petit monde évolue dans un village
retiré et difficile d’accès (routes qui rejoignent le village en mauvais état),
ils donnent une impression de villageois un peu bourrus qui vivent en autarcie
et ne veulent pas que des étrangers au village viennent perturber leur petite
vie tranquille. Caroline Sers nous donne
donc l’impression pendant 219 pages d’être hors du temps, là où les mentalités
n’ont pas encore changé. J’ai aimé l’écriture simple et directe. Les
descriptions, les personnages caractérisés par un trait de caractère comme
Claude, doux rêveur ou par leur profession, Jean le cafetier, la boulangère, le
vétérinaire etc. J’ai tout de suite été plongée dans cet univers pittoresque de
campagne.
Ce livre soulève quelques
questions au sujet de la presse et de son ingérence dans les enquêtes
policières, de sa façon de relier des évènements entre eux, d’en rajouter pour
vendre et éveiller la suspicion. La vision justement qu’ont les médias mais
aussi les habitants des grandes villes sur les petites villages. La suspicion
des villageois à l’égard des citadins. Mais surtout, le non-dit et la
solidarité dans les villages.
J’ai donc beaucoup aimé ce
livre mais j’ai regretté cependant que la Maison Tudaure n’est finalement pas
une place si centrale que ça dans le roman.
J’ai parfois trouvé les
histoires de chacun par rapport aux évènements un peu tirées par les cheveux,
et la conclusion m’a laissée un goût d’inachevé ! Que va-t-il arriver à
Claude, auquel je me suis attachée ? Est-ce qu’un père agirait vraiment de
la sorte avec son fils ? (pour comprendre de quoi je parle il faut lire l’épilogue
vous m’excuserez donc de ne pas en dire plus !)
Deux extraits :
D’abord, p32 la description
de la Maison Tudaure : « Quand on observait la bâtisse depuis la
route, face à la porte d’entrée, on était frappé par la symétrie de la façade.
Les fenêtres se répondaient, les ornementations au-dessus de la porte étaient
rigoureusement semblables à celles qui surmontaient les meurtrières, et seules
deux des tours étaient visibles, de part et d’autre du corps de logis. Mais si
l’on faisait quelques pas à droite ou à gauche apparaissaient les éléments qui
donnaient toute sa beauté et son étrangeté à l’édifice. La troisième tour se
dévoilait, plus petite que les autres. […] Là, les ouvertures donnaient le
sentiment que les demi-étages étaient légion, les appendices foisonnaient, et
le regard se perdaient dans les décors étranges apposés sur les pierres
sombres. Une fantaisie architecturale, une folie… »
Et un extrait du journal concernant la découverte dans les bois que le journaliste relie à un évènement du passé p 80 : « Le village est d’ailleurs connu pour l’affaire qui s’y déroula il y’a près de cinquante ans, et dont les circonstances font dire aux anciens que les démons du passé sont revenus. Les horreurs ont parfois la vie longue, et de la mémoire… »
Je dois cette agréable lecture à Blog-O-Book et aux Editions Le Livre de poche que je remercie pour ce partenariat!
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